J’ai écrit le début de ce texte il y a exactement une semaine depuis ma petite école des rizières…je vous la livre avec déjà une pointe de nostalgie car ces saveurs, parfums, rires et moments d’intimité et de bonheur avec une communauté qui m’a accueillie comme l’une des leurs m’ont touchée profondément. L’être humain peut être si bon, convivial et ouvert…parfois et surtout si on a la chance de tomber sur le bon spécimen!
Un voyage de milliers de km commence par un premier pas. Voici ce pas et même certains suivants franchis. A l’ombre des frangipaniers,
Il y avait un peu d’appréhension ou en tout cas énormément de curiosité en arrivant ici et en écrivant mon premier message depuis Ban Nan Dee. Il y a beaucoup de nostalgie et d’arrachement à l’idée de laisser derrière moi la petite école des rizières, là où fleurissent, comme au Laos voisin dont c’est l’emblème national, les frangipaniers.
J’essaie d’emmagasiner un maximum de sensations et de souvenirs « que je chérirai toute ma vie » comme dit ma copine Laurence en singeant le Petit Nicolas…
L’idée de redevenir une touriste si tant est que j’ai cessé de l’être, ce qui reste à prouver, à la fois me rassure et me désole. Cela me rassure car je retrouve mon petit monde familier, les aéroports, les douanes, les hotels et bientôt mon appartement de Chiang Mai avec mes petits camarades venus me rejoindre, Laurence et Ruddy qui vont m’accompagner jusqu’au terme de ce périple en Asie du Sud-Est. Mais quitter la petite école me fend le cœur et je laisse un peu de moi derrière moi, vous pouvez y compter !
Depuis la petite école déserte pour cause de Journée des Enseignants, je passe une merveilleuse fin d’après-midi à l’ombre d’un soleil de janvier sec et chaud. Il m’est impossible de décrire l’extraordinaire sensation de bien-être et de calme qui règne ici. On entend bien au loin passer les voitures sur la route, mais c’est un vague bruit de fond somme toute assez espacé pour qu’on ait réellement le sentiment d’être dans un cocon protégé. J’aime l’idée de relire ces lignes une autre année et c’est un peu pourquoi je les écris sur le vif, outre le plaisir de vous faire partager ce voyage, un autre sentiment très agréable !
Dire que j’ai beaucoup plus appris sur la Thailande en deux semaines en Issan qu’en un mois et demi à Chiang Mai n’est nullement exagéré. Tant d’un point de vue linguistique que socioculturel, je suis infiniment plus riche qu’en arrivant ici.
A présent, je vois ce pays, ses habitants, ses codes de couleur, de conduite, ses limitations autant que ses infinies qualités humaines.
Voir une petite bonne femme dont le rêve est d’être prof d’anglais et qui dépasse déjà certaines de ses profs. Autant d’espoirs précieux avec lesquels je repars et de vœux que je forme pour que ces deux élèves et tous les autres parviennent à surmonter les nombreux obstacle que le Siam immobile ne manquera pas de dresser devant eux car évidemment, la perfection n’est pas plus de ce monde qu’elle n’est de ce pays par ailleurs extraordinaire !
Ce mercredi 16 janvier est donc un jour férié pour les écoles de Thaïlande, c’est la Journée des Enseignants. Il semblerait qu’il
en ait une autre en juin. Toujours est-il que Google Thaïlande la célèbre à sa manière en ayant une image spéciale ce jour là :
J’en profite donc pour vous exposer mes petits camarades que je m’apprête à quitter avec beaucoup de regrets car ils ont été des hôtes absolument parfaits.
Je vais commencer par l’autre étrangère de notre équipe, une femme absolument adorable et incroyablement dévouée, Maki, qui vient
du Japon. Maki est une infirmière à la retraite qui vient passer 8 mois comme volontaire dans la petite école. Ses conditions de vie sont autrement plus spartiates que les miennes puisqu’elle avait initialement insisté pour se trouver dans les dortoirs des enseignants, ce qui implique exiguité, promiscuité, une certaine dose de saleté et de bestioles de tout poil…et des conditions de vie absolument thai qui par comparaison font de ma maison un palace 5 *
Elle n’est donc pas une Farrang à strictement parler puisque celles et ceux qui ont lu mon explication dans le message précédent savent que cela vient de Farrancsé (français) et que cela concerne les européens, américains et autres caucasiens (En parlant de caucasiens, j’ai à chaque fois la surprise de découvrir que le formulaire d’obtention du visa du Laos exige qu’on spécifie sa race.
Lamphun (voir photo plus bas) est une enseignante absolument hors du commun. Pour qui connaît la Thailande, on dirait qu’elle a brisé le moule. Mariée tard à un Farrang, elle a étudié en Nouvelle-Zélande et au Japon, parle un anglais quasiment impeccable, en tout cas un tinglish (thai english) parfait ! Elle vient d’ailleurs de recevoir aujourd’hui sa xième décoration en tant qu’ enseignante d’anglais exemplaire.
« good morning teacher how are you today » à quoi l’enseignant répond « I’m fine and you » et la classe répond « Fine, thank you, Teacher ».
Et en fin de cours:
« Thank you teacher, see you next time »
Il faut dire qu’outre un terrain défoncé qui sert de piste de pétanque, il faisait sombre et ceux qui me connaissent savent que la nuit je n’y vois rien. Cela dit, je vous rassure, en plein jour aussi, j’aurais eu droit à une raclée identique !!!
L’équipe des profs d’anglais est évidemment celle dont je suis la plus proche puisque, outre des cours de mise à niveau, j’essaie de leur donner quelques cours de méthodologie.
Je voudrais donc citer l’adorable Om (voir photo plus bas avec ses collègues).
Il y a aussi une autre femme tout à fait remarquable, la très drôle et sympathique « Big Jiep ».
Ici en Thailande, on appelle un chat, un chat…et une grosse….une grosse ! Inutile de vous dire que mon format ici est pour le moins hors du commun et qu’ayant vu les photos de mon anniversaire, le corps enseignant a enfin accepté de cesser de me suralimenter afin que je continue à surveiller ma ligne (certes de loin…mais tout de même !).
…et à notre déjeuner de ce midi sur le Mékong. Un des plaisirs de cette région, puisqu’on nous sert un poisson à la croute de sel (Pla Pao) littéralement sur les rives du fleuve, avec une vue imprenable sur le Laos à quelque brassée de là.
Il y a d’ailleurs un bureau de l’immigration à Phon Pisai qui fonctionne les mardis et samedis matin, jours de marché. Je regrette d’avoir raté cela mais qui sait si une autre fois je n’aurais pas une autre occasion de voir cet aller retour de marchands surtout Laotiens vers la Thaïlande d’ailleurs !
17 heures 30 est l’heure où les moustiques Issan (« des scuds » dixit Gilles Bernard, mon guide et mentor dans cette expérience) sévissent ! Me voici à l’abri dans la maison, même si le toit ondulé et tout à fait non-hermétique, laissent passer une horde de bestioles que ma moustiquaire me permet d’éviter un tant soit peu. Bien que largement entamée par les moustiques, je dois à je ne sais quel miracle d’avoir été finalement relativement moins touchée que la moyenne des Farang (surtout les NTD Farrangs, autre expression de Gilles et Lamphun, i.e. Near To Death….and married to women 30 to 40 years younger than themselves;-)).
19h30, il fait nuit noire et je suis déjà sous ma moustiquaire, cédant la place à toutes les bestioles de la nuit. Je viens de me battre avec une grenouille pour mon accès aux toilettes, vu qu’elle avait élu domicile à l’intérieur du couvercle. Elle m’a même sauté dessus mais je ne me suis pas transformée en princesse et l’ai éjectée illico, lui faisant pousser un croassement tout à fait remarquable. A présent, de l’autre côté de ma moustiquaire, un cafard grimpe le long du mur et j’espère juste qu’il va finir par aller voir ailleurs car son mouvement est fort peu sympathique. Par contre, certains moucherons ont apparemment emprunté le même chemin que moi et je dois cohabiter avec eux…un moindre mal dans le fond !
Ce qui est intéressant et émouvant dans ce voyage c’est la véritable découverte pour la citadine qui a un peu connu la campagne des années 65-75 en France, d’un mode de vie et d’une population peu accessible aux touristes, de la ruralité telle que je l’ai un tout petit peu approchée et qui a totalement disparu de nos tristes tropiques où le sourire se fait trop rare. Comme le disait Niphon que je citais dans mon précédent papier, la spiritualité a été remplacée par le matérialisme.
je suis émue de relire ces lignes alors que je suis déjà de retour à Chiang Mai après être passée par Vientiane et Hanoi, deux villes où je me sens déjà un peu chez moi! De mes frangipaniers, recevez mes amicales et chaleureuses pensées. Les rencontres marquantes, les délices gastronomiques asiatiques et mon extase dans la baie d’Halong feront l’objet de mon prochain papier…Cela prouve qu’il y a un futur…ce qui en hébreu se dit Yesh Hatid, comme nous venons de l’apprendre au dépends de Bibi!
Je suis en admiration devant ton texte tellement souriant où toutes les créatures s’entremelent, tu as réussi une distanciation exemplaire de ton propre égo et tu es arrivée à établir des rapports différents et un méta-langage impliquant humains, crapauds, sauterelles..
En retrouvant CM, c’est ton home sweet home, et comme la relativité est vérifiée ici! enfin chez toi à Chiang Mai!
Un dernier détail! Daphné est un etre différent en français, ses expressions et ses sentiments se dessinent aux contours des mots! En anglais, elle est autre et délicieusement différente!
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I’m humbled by such kind words! Now you understand why I write in both languages…touchée, sur toute la ligne! Mais on est assez cosmo pour être chez nous… Partout dans ce monde! Mon copain Marko à qui je pense beaucoup car il passe en ce moment sur le billard m’a écrit un petit mot que je n’osais reproduire mais après ton analyse plus amicale que critique (merci!), je te la livre :”You have a gift, my dear, a very precious and multiple one – empathy, sensibility and the talent to communicate it. Of course, the frog could not make you a Princess ! You are a Princess”.
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